Le statut étudiant entrepreneur : interviews

Le statut étudiant entrepreneur interviews

On vous parlait précédemment du statut étudiant-entrepreneur dans un article complet. Voici maintenant, en complément de celui-ci, un témoignage de deux porteurs de projet qui ont fait le choix d’acquérir ce statut : Maïlys et Malo.

Malo Gouézec

Je m’appelle Malo Gouézec, j’ai 21 ans et je suis étudiant-entrepreneur. Mon projet est de créer un studio de jeux vidéo.

 

Maïlys Hernandez

 

Je m’appelle Maïlys, je suis étudiante entrepreneuse et mon projet se nomme LUGE. On fait de la livraison de repas à domicile en station de ski. ​On livre des petits-déjeuners, repas midi et soir et même des apéros (attention : pas de livraisons sur les pistes !). On débute l’activité l’hiver prochain à Tignes !

Quel parcours avez-vous suivi ? 

MALO : Après une classe préparatoire scientifique, j’ai démarré une formation d’ingénieur en informatique à Polytech Annecy.

MAÏLYS : Après un Bac ES passé à Paris, j’ai voulu poursuivre des études en commerce. Passionnée de ski, je me suis rapprochée des montagnes en intégrant la licence Economie-Gestion de l’IAE d’Annecy (Université Savoie Mont Blanc). L’année prochaine, je passe en L3 Marketing-Communication dans cette même université. L’université me fait intégrer le parcours avec les SHN (sportifs de haut niveau). Cela me permet de ne pas avoir cours de l’hiver et de me libérer du temps pour tester mon business model en station.

Pourquoi se lancer ? Quand ? Comment ?

MALO : J’ai toujours aimé inventer des histoires, que ça soit par l’écriture ou le dessin. C’est une passion qui est pendant longtemps restée en parallèle de mes études scientifiques. Ce n’était rien de plus qu’un loisir. Mais avec la découverte de l’entrepreneuriat, j’ai réalisé que je pouvais allier les deux en un seul même projet. J’ai commencé après ma première année en école d’ingénieur, à un moment où ma vie a beaucoup changé. Je me suis dit qu’il ne fallait pas attendre mais plutôt se lancer. L’université m’a permis de faire une année de césure, un an pendant lequel j’ai disposé de tout mon temps sans pour autant quitter ma formation. J’ai également suivi le parcours entrepreneuriat proposé par l’université.

MAÏLYS : Personnellement je me suis lancée car j’avais besoin de pratique, ce que je ne trouvais pas dans mes études universitaire très théoriques. J’ai toujours eu cette fibre entrepreneuriale et cette envie de mener à bien mes projets. Il n’y a pas d’âge pour se lancer, ni même de profil type. Le plus important est de bien s’avoir s’entourer. En étant étudiant on a la chance d’avoir accès à différentes structures d’accompagnement et de formations. Je m’étais rapprochée du Parcours Entrepreneuriat annécien de l’USMB et j’ai aussi obtenu le Statut National d’étudiant-entrepreneur, rattaché au PEPITE Ozer à Grenoble.

Qu’est-ce que cela vous a apporté dans votre projet ? 

MALO : En réalité, je n’ai obtenu le statut d’étudiant-entrepreneur que très récemment. Il va me permettre de rencontrer des personnes issues de l’industrie du jeu vidéo ou plus globalement, du monde de l’entrepreneuriat, mais aussi d’autres étudiants-entrepreneurs.

MAÏLYS : Obtenir le SNEE c’est l’occasion d’avoir à disposition un réseau professionnel indispensable à l’évolution du projet. Nos chargés d’accompagnement peuvent nous accompagner dans nos démarches entrepreneuriales et nous financer des formations selon les besoins du projet. Porter son projet au sein d’une promotion d’étudiants-entrepreneurs c’est aussi bénéficier de la dynamique du groupe pour faire mûrir son idée, la challenger et s’entraider.

Racontez-nous une journée type ? 

MALO : Ma situation ayant beaucoup évolué au cours de l’année, en voici deux.

→ Au début d’année :

Je me levais à 6h, de 6h30 à 13h je travaillais dans un supermarché à Annecy. Après un repas et une sieste bien méritée, je commençais à travailler vers 14h30 sur le « business model » de mon projet ainsi que sur la conception du jeu. L’heure à laquelle je finissais n’était jamais vraiment fixe (18h, 19h, 22h).

→ En fin d’année :

Levé vers 8h30 et au bureau le plus tôt possible. Vers 13h, pause déjeuner avec les voisins de bureau des papeteries. Départ dans l’après-midi/début de soirée selon le travail accompli. Direction le lac ou une terrasse pour profiter de la soirée avec des amis (parce que c’est important).

MAÏLYS : En licence, les cours étant aléatoires selon les semaines, c’est une organisation de tous les jours, d’autant plus que je suis dispensée de cours grâce à mon SNEE. Chaque jour je regarde donc quelles sont mes obligations entrepreneuriales et scolaires afin de m’organiser. Le plus souvent, le matin avant d’aller en cours je fais un peu de veille et je m’occupe de mes mails. J’ai des rendez-vous 3/4 fois par semaine environ et autant de formations ou évènements liés à mon entreprise (conférences, afterworks, réseautage…). C’est le soir que je consacre une partie de mon temps au travail de fond sur mon projet. On vit des journées très intenses.

Comment gérer vous le financement, les aides ? Quels sont les avantages ?

MALO : N’ayant pas de dépense majeure pour l’instant, le financement n’est pas un problème. Ceci est évidemment voué à évoluer et pour cela, différentes solutions existent comme les bourses, les prix de concours et d’autres. Être exonéré de certaines charges, comme le loyer de mon bureau fait partie des avantages. De même que d’avoir un suivi du projet par des personnes compétentes et expérimentées. Se créer un carnet d’adresse essentiel pour faire vivre et évoluer son projet.

MAÏLYS : Quand on est jeunes on a souvent peu de fonds propres à investir, et l’argent dans le cercle familial peut être compliqué à trouver. En phase d’ante-création, les acteurs nous financent le plus souvent des formations et de l’accompagnement et non le projet directement. D’après moi, le plus pertinent pour lever des fonds est d’enchaîner les concours. Il en existe énormément parfois très spécialisés, c’est l’occasion d’apprendre à pitcher son projet et de se faire du réseau. Avec notre profil les financements et aides adaptés sont le plus souvent des subventions pour la création chez les jeunes comme Pass active jeunes (dispositif de « France active » qui propose une bourse de 2000€ pour les créateurs d’entreprise de moins de 26 ans, ils font aussi de la mise en réseau, de l’accompagnement et du prêt d’honneur). Je lance mon projet qui est financé par la région et pris en charge par la CCI et l’ACRE, une aide gouvernementale à la création d’entreprises qui nous exonère de certaines taxes.

Quelles sont les limites ? Les inconvénients de ce statut ?

MALO : À la différence du statut des sportifs et musiciens de haut niveau, le statut n’est pour l’instant pas encore suffisamment intégré par les programmes pédagogiques des différentes formations.

MAÏLYS : Lorsque l’on souhaite s’investir à 100% dans son entreprise, sans lâcher ses études, il n’existe pas de réel dispositif qui nous permette un aménagement de cours adapté à l’image des statuts pour les SHN ou les musiciens…

On peut être dispensé de cours ce qui a pour simple effet de nous éviter des démarches administratives pour justifier nos absences, mais cela ne nous aide aucunement scolairement parlant.

Il faudrait mettre en place des cours d’été ou des cours en ligne… Avec le SNEE, nous n’avons pas de mention ou de reconnaissance sur le diplôme non plus. On comprend qu’il s’agit d’un dispositif encore jeune qui doit encore s’intégrer d’un point de vue académique, la Ministre de L’Education Nationale s’est d’ailleurs exprimée sur le sujet et reconnaît le besoin d’intégrer l’entrepreneuriat au sein des universités. ​De plus étant étudiante à Annecy, le SNEE m’oblige à me rendre à Grenoble fréquemment pour mes obligations liées au statut ce qui est souvent fatiguant surtout lorsqu’il s’agit des afterworks ou formations sous forme de « cours du soir ».

Comment gérer cette double activité : étudiant et entrepreneur ? 

MALO : Mon année de césure m’a permis de libérer le temps dont j’avais besoin, je n’ai donc pas réellement expérimenté cette double activité. J’ai cependant travaillé pendant plusieurs mois en parallèle de mon projet. La clef est de ne pas se tuer à la tâche, réévaluez régulièrement votre motivation. Si elle baisse, ralentissez le rythme, donnez-vous du temps de repos. Vous ne serez que plus enjoué à l’idée de ré-attaquer.

MAÏLYS : Pour ma part, j’ai eu la chance d’obtenir un aménagement d’études de l’université pour ma seconde année au sein du dispositif. Sans le soutien de la fac cela aurait été très compliqué à gérer… On peut aussi remplacer son stage en entreprise par le travail au sein de notre entreprise.

Pour gérer le fait d’être étudiant et entrepreneur : il faut savoir être autonome, s’organiser et avoir une capacité à ne rien lâcher, savoir se remettre en question et faire la part des choses quand c’est nécessaire entre études et entreprise.

Avez-vous des conseils à donner aux étudiants qui ont l’âme entrepreneur ? 

MALO : Vous avez le temps et le choix ! Être étudiant en France, c’est avoir la possibilité de faire et surtout de trouver ce qu’il vous plaît. Alors écoutez les conseils, acceptez les remarques mais ne laissez personne choisir pour vous le chemin à prendre. Ensuite, si vous hésitez à vous lancer, c’est que l’envie est bien présente en vous. Alors lancez-vous, vous n’avez rien à perdre. Enfin, n’ayez pas peur d’en parler autour de vous. Partager mes idées et la vision que j’avais de mon projet avec d’autres personnes m’a vraiment aidé à rester motivé à 100 %.

MAÏLYS : Si tu as envie d’entreprendre alors que tu n’as pas fini tes études, met toutes les chances de ton côté en te faisant accompagner. Entreprendre jeune c’est l’idéal pour se créer un réseau, on a pas encore de famille à charge ou d’emploi important à quitter, le risque est minimisé et on a rien à perdre. Et si un jour l’expérience entrepreneuriale s’arrête cela aura été une expérience professionnelle très enrichissante et un vrai plus sur le CV.

Malo Gouézec & Maïlys Hernandez