L’enseignement supérieur, le nouveau marché préféré des fonds d’investissement

enseignement supérieur Le nouveau marché préféré des fonds d'investissement

En France, le marché de l’enseignement supérieur est en pleine croissance et connaît un véritable basculement structurel. Alors qu’au début des années 2000 la France comptabilise 2000 établissements, en 2023 on en référence désormais 3500. Un secteur qui connaît une croissance sans précédent et où les investisseurs sont de plus en plus nombreux. Pourquoi les écoles sont-elles devenues les objets convoités des fonds d’investissement ?

L’enseignement supérieur privé, une croissance linéaire venant pallier les carences de l’Etat.

Chaque année, ce sont près de 3 millions de jeunes qui sont inscrits dans un cursus de l’enseignement supérieur. Un chiffre qui ne cesse d’augmenter avec la démographie et l’accessibilité des études supérieures dans notre pays.

Néanmoins, il est bien loin le temps où l’on pouvait arguer fièrement venir du pays où “les études sont gratuites” car aujourd’hui, l’enseignement supérieur a un tout autre visage. En chiffres l’enseignement supérieur privé en France aujourd’hui c’est : 176 universités et plus de 25% des étudiants inscrits. Une progression de 10% rien que sur l’année 2021/2022.

Pourquoi les étudiants se tournent-ils de plus en plus vers le privé ?

Il y a bien entendu plusieurs raisons à cela.  La peur d’échouer à cause du manque d’encadrement dans les universités publiques. L’image trop théorique que renvoie l’enseignement public et parmi la plus médiatique : le controversé Parcoursup qui laisse chaque année un grand nombre d’étudiants sur le carreau. Un étudiant qui n’a pas été accepté sur Parcoursup peut se tourner finalement vers un établissement privé. En juillet 2021 c’était 91178 candidats qui n’avaient toujours pas reçu de proposition. 

Pour toutes ces raisons, l’enseignement supérieur, et ce malgré son coût, a clairement le vent en poupe. Ce qui explique pourquoi le nombre d’établissements a presque doublé ces vingt dernières années. Aujourd’hui, une année dans l’enseignement supérieur coûte en moyenne 8000 euros/ an. Un coût non négligeable que beaucoup sont prêts à investir pour bénéficier de plus petits effectifs et donc d’un meilleur encadrement.

L’avènement de l’alternance post-covid a aussi eu son rôle à jouer dans le match public/privé. Force est de constater que le secteur privé était en avance sur cette modalité d’apprentissage. Cela était donc beaucoup plus facile pour eux, d’atteindre cette double nouvelle cible : des étudiants qui feront financer leurs études par leur entreprise, et des entreprises qui cherchent du personnel à moindre coût. Jackpot.

Le financement des formations est désormais supporté par les opérateurs de compétences auxquels contribuent les entreprises. Une démarche gagnant-gagnant qui bénéficie autant aux entreprises qu’aux étudiants, mais aussi, il faut le dire, aux établissements privés qui pour beaucoup connaissent des croissances phénoménales depuis l’arrivée de cette réforme. La machine à billets est lancée !

Quelles raisons économiques et financières expliquent l’intérêt des investisseurs pour l’enseignement supérieur ?

Nous l’avons vu, depuis plusieurs années, l’enseignement supérieur français connaît une forte croissance. La démographie est sans appel, il y aura chaque année de plus en plus d’étudiants à la recherche d’une école. L’investissement dans les Universités étant à l’arrêt, le privé a le champ libre pour s’étendre. De plus, l’enseignement supérieur fait partie des secteurs qui se placent en haut de la fourchette en termes de retours sur capitaux investis. 

Dans ce marché en pleine croissance, les fonds d’investissement qui n’y sont pas veulent y aller et ceux qui y sont déjà investissent encore plus d’argent pour leur permettre de se développer davantage.

L’évolution des frais de scolarité a été très dynamique : elle a été très régulière dans toutes les spécialités, a minima de 2 % tous les ans voire au-delà de 5 % dans certains domaines. Il y a aussi un critère financier lié à la trésorerie, Les étudiants paient les frais de scolarité en début d’année. Par rapport à d’autres systèmes où vous êtes payés 90 jours après avoir livré votre travail. 

Mais en réalité, si les écoles rejoignent un groupe, fusionnent ou sont rachetées, c’est que le plus souvent elles y sont contraintes. Elles sont de plus en plus nombreuses à avoir du mal à boucler leur budget. En cause, la hausse des dépenses. Les portefeuilles explosent le budget dans le marketing et la communication pour se démarquer dans le marché de plus en plus concurrentiel. Mais aussi dans l’acquisition d’équipement de pointe et de divers frais, site internet, plateforme… 

Les petites écoles sont aspirées par l’effet « Groupe”. Elles ne peuvent plus faire le poids face à ces écoles qui mutualisent leurs coûts autour de quelques grandes marques et investissent des millions en acquisition.

Mais qui sont ces grands groupes?

 En France il existe 6 mastodontes dans l’enseignement supérieur : Galileo Global Education, Eduservices, GES&Eductive, Ionis ,Education Group et l’Inseec. Ils possèdent à eux seuls plus de 200 écoles et sont les leaders du marché.

  • Galiléo, avec 57 écoles et 200 000 éleves, des domaines de formation variés: commerce, droit, finance, médecine et industries créatives. En 2022 c’est 1,5 milliard d’euros investit pour développer son réseau d’écoles. Dernières acquisitions, une école spécialisée dans la création artistique, la LMA.
  • Eduservices, avec plus de 30 écoles et 34 000 éleves, des domaines aussi large: langues vivantes, métier du digital, management, communication et j’en passe. Avec ses récentes  acquisitions CDAF-ESAP, Bachelor factory et Win il est bien un des groupes leader du marché.
  • L’union fait la force, GES a fusionné avec Eductive, ils accumulent  pas moins de 15 000 élèves pour plus de 90 écoles.
  • Ionis éducation group compte 30 000 étudiants avec pas moins de 29 écoles.

On remarque que les premières années, les marques écoles sont restées fortes mais elles viennent souvent s’effacer de plus en plus en faveur de la marque groupe. Ce qui permet de faire des économies importantes en termes de marketing. Ce qui s’apparente à un jeu schizophrénique de jonglage entre marque d’école et de groupe. Les fonctions supports sont très souvent au niveau du groupe tandis que certains groupes continuent de promouvoir les marques écoles qui ont une grande notoriété. Les fusions et rachat étaient déjà dynamiques dans ce secteur il y a quelques années, aujourd’hui la course à l’acquisition d’écoles supérieures n’en est pas moindre. Ce qui va sans doute faire que s’accroître dans les années à venir avec la crise sanitaire et financière que traverse le pays.